jeudi 1 octobre 2015

Le 6ème tournoi des nouvellistes, commentaires des nouvelles de la semaine 3

C’est au tour du groupe C de passer dans l’arène. Je suis donc toujours au rendez-vous pour commenter cette nouvelle fournée. Allez, c'est parti. On clique sur le lien ! 



Matin d’acier, par Emmanuel Delporte :
Il se trouve que je suis un grand fan d’Isaac Asimov. Je pense avoir tout lu ou quasiment de ce qu’il a écrit en fiction (sauf les veufs noirs, j’aime bien mais comme c’est pas de la SF, j’ai toujours un peu traîné les pieds). Bref, passons, disons que je connais bien le sujet du robot qui déraille en dépit des trois lois de la robotique, puisque c’est très souvent le point de départ des nouvelles du « bon docteur ». L’originalité de cette nouvelle que je peux noter, c’est qu’ici on ne suit pas l’histoire du point de vue humain mais de celui du robot. Le récit est bien écrit, mais j’ai tout de même trouvé le style un peu trop ampoulé pour qu’on croit vraiment être dans la tête  d’un robot. Au passage, je n’ai pas compris pourquoi le récit est écrit au passé et bascule sur la fin au présent.  Je pense que le présent tout du long avec un style plus sobre aurait mieux collé aux pensées d’un robot.

Trois points m’interpellent également :

-    Trop de références nuit : USS Magellan = Star Trek, perturbation « anormale » venant de Pluton (variation de 2001 où c’était Jupiter. ) et bien-sûr Asimov avec les trois lois de la robotique citées dans le texte.

-   Manque d’originalité de la part de l’auteur : Reprendre l’univers d’un maître de la science-fiction à ce point, c’est peut-être trop facile. J’aurai préféré que l’auteur crée SON univers avec ses codes à lui.

-   La 4ème loi de la robotique (telle que définie dans « les robots de l’aube ») n’est pas explicitée alors que les trois lois officielles sont énoncées textuellement. Du coup à qui s’adresse la chute de l’histoire si ce n’est aux lecteurs d’Asimov capables d’en comprendre le sens ? Les autres qui ne connaissent pas Asimov risquent d’être laissés de côtés. Quand à ceux qui le connaissent, ils feront la comparaison inévitable de cette nouvelle avec une des « Robots », ce qui ne peut que lui porter préjudice.

Ces remarques mises à part,  j’ai trouvé le récit globalement bien mené et agréable à lire.


Des vacances à la ferme, par Jean-Marc Sire :
Exceptionnellement, je ne parlerais ni de l’histoire, ni du style concernant cette nouvelle. Je ne vais pas non plus critiquer l’auteur dans ses défauts ou dans ses qualités, même si j’ai deux trois choses en tête. Non, c’est juste que je ne comprends pas la raison de sa sélection. J’ai relu deux fois pour voir si j’étais passé à côté de quelque chose, et pourtant j’ai toujours pas vu en quoi cette nouvelle était SFF. Pour moi, quelque soit les qualités ou non de cette nouvelle, c’est juste hors-sujet, désolé.



Le Novillero des sables ou Un taureau dans le désert , de Jacques Chérencé :
Autant être franc avec vous, je considère que la tauromachie est un acte de barbarie héritée d’un autre temps et que cette pratique aurait dû être abolie depuis des lustres. Je ne comprends pas comment on peut voir de l’art dans l’exécution d’un animal. Je n’en suis pas à souhaiter la mort du torero par le taureau, mais j’en suis pas loin. Lire un récit qui n’est pas loin d’en faire l’apologie me hérisse le poil. Ca ne m’empêche pas de faire la part des choses, et je vous rassure j’ai lu ce récit avec la plus grande objectivité.
L’histoire ne m’a pas vraiment emballé, je dois le reconnaître. Si on résume, on a un torero qui conduit sa nouvelle voiture dans le désert (pourquoi ? mystère.), qui tombe en panne et qui prend un coup de chaud. Entre les deux, il a des souvenirs de son expérience de torero.

Au niveau du style, comme souvent, c’est bien écrit. Le présent est bien exploité, ça m’a plu. Cependant, j’ai deux petites remarques :

-   L’ensemble est trop chargé en descriptions. Personnellement, j’aime les descriptions, Proust, Zola et Balzac sont mes amis. Celles de l’auteur sont plutôt bien faites, sur le désert, les décors, les personnages. Mais en même temps, une nouvelle ce n’est pas un roman, il faut être efficace. Trop de descriptions dans une nouvelle vient nuire au rythme quand ce n’est pas carrément du meublage. Ici, je prends la première option.

-     Le vocabulaire de la tauromachie est surexploité : c’est le sujet, vous me direz. Mais là, on a l’impression, d’une, que l’auteur cite son dico, et de deux qu’il s’est donné la mission de caser tous les mots de son dico. Ok, c’est documenté, mais c’est peut-être un peu trop.

Au niveau thématique, pour moi la nouvelle passe de justesse le test de compatibilité SFF. S’il n’y avait pas la fin où on apprend que le héros s’avère être la réincarnation d’un taureau et qu’il s’est battu avec son propre descendant, on serait hors-sujet.

Sur le plan du vocabulaire, une petite remarque au passage : un taureau n’est pas un fauve. Ça m’a surpris de lire ça pour un auteur qui maîtrise à ce point le vocabulaire de la tauromachie. Le taureau c’est un bovin, une bète, un animal féroce, un ruminant, je ne sais pas, mais pas un fauve. Enfin, la tournure de phrase « Je n’ai guère souvenance », m’a fait lever un sourcil. Sans doute faut-il y voir là une tentative de ne pas faire de répétition ou recherché. Bien essayé, mais ça rend le texte trop ampoulé pour le coup.

Pour conclure sur cette nouvelle, je pense que l’auteur, à la fin, n’a pas été jusqu’au bout de son idée. On sent qu’il a voulu faire réincarner le torero en taureau, mais qu’il s’est dit que ce serait trop prévisble, alors, il a fait passer son expérience mystique pour un coup de chaud (ou pas, c’est un peu comme on veut).

Les tromperies d’Outremer, de Chimène Peucelle :
Voilà un texte original qui se lit sans mal. Outremer nous conte ses malheurs sur le ton de la confidence. Le ton d’Outremer est alerte même si la fausse modestie du narrateur sur les qualités de son texte m’a un peu agacé (pourquoi s’auto-descendre ? Dans l’idée qu’on répondrait « mais non c’est bien » ?). Par bien des côtés, cette nouvelle m’a fait penser au magasin des suicides (à la différence qu’ici on vend des sorts de mensonges). Et comme le magasin des suicides, les clients défilent, une cliente qui veut croire qu’elle est morte, un jeune qui fait le pari de mentir au menteur, une braqueuse de charmes (dans tous les sens du mot). Alors, oui j’ai passé un moment agréable, mais je n’ai pas été emporté non plus et du coup, je n’ai pas grand choses à dire. Le sort d’Outremer n’a donc pas forcément bien fonctionné sur moi.


Voilà ce que je pouvais dire sur ces 4 textes. A la lecture de mes commentaires, je m’aperçois que je n’ai pas été particulièrement tendres, même si mon ambition de départ est d’être encourageant. Je ne vous cache pas que ce groupe m’a globalement déçu. Que les auteurs des nouvelles, si d’aventure ils venaient à me lire (ce qui me semble peu probable vu ma diffusion quasi-confidentielle), ne soient pas découragés par mes propos. Je suis moi-même un auteur qui a des travers, qui écrit du mieux qu’il peut quand il a le temps, qui enfonce des portes ouvertes, qui tombe dans le panneau de tous les clichés, qui est pétri d’habitudes et d’influences, bref, je n’ai donc pas de leçon à donner, ce que j’écris là n’est que mon avis. Aux auteurs concernés de prendre ce qu’ils veulent, ou rien du tout.


Encore une fois, je vous invite à faire votre propre avis en LISANT les nouvelles sélectionnées et surtout ensuite d’aller VOTER pour vos préférées. A la prochaine ! 

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