Quelqu'un m'a dit il y a quelque temps lorsque je commençais ce blog qu'il était de bon ton de parler des livres qu'on apprécie afin que le visiteur (éventuel) du blog puisse se faire une idée de mes gouts. C'était une excellente idée que j'avais mise dans un coin de ma tête. Aujourd'hui, le temps est enfin venu de faire une première chronique. Je n'ai pas choisi la facilité puisque je vais m'attaquer aujourd'hui à Ilium de Dan Simmons.
Dan Simmons est et restera célèbre pour son œuvre phare
« le Cantos d’Hyperion », une œuvre de science-fiction intelligente
et foisonnante, un « livre-univers » à l'équivalent de Dune ou du
Seigneur des Anneaux. Dan Simmons, c’est aussi un auteur aux talents multiples
qui sait passer d’un genre à l’autre ou d’un style à l’autre. Il le prouve avec
maîtrise dans un livre paru en 2003, j’ai nommé Ilium.
D’entrée de jeu, le titre exige une explication. Ilium c’est le nom de la ville de Troie,
la ville mythique où se déroule la fameuse guerre contée dans
« l’Iliade » par Homère. Voilà donc que Simmons va verser dans la
mythologie et nous donner sa version de la guerre de Troie. Ironie du sort, le
livre est sorti quasiment en même temps que « Troie », au
passage l’un des films les plus mauvais
sur le sujet, ce qui pourrait nous faire croire à une relation. Rassurez-vous
la relation s’arrête à la ville en question.
Malgré son sujet mythologique, Ilium est contre toute attente un lire
de science-fiction. Alors comment Simmons s’y prend-t-il ? Il adopte un
point de vue inédit, comme lui seul pouvait l’imaginer, inédit et même assez
déconcertant au début. En effet, voilà qu’un historien du XXème siècle a été
ressuscité par les dieux de l’Olympe pour surveiller le bon déroulement de la
guerre de Troie par rapport à l’œuvre
d’Homère. Déjà rien que le propos, on est perdu dans nos repères
chronologiques. D’autant que les « dieux » en question vivent sur
Mars dans un lointain futur et interagissent sur la guerre de Troie (celle de
la mythologie) à coups de technologie quantique. L’historien (ou scholiaste) a
été doté de tout un arsenal et de la capacité de morphing pour se glisser à
l’insu des combattants pour mieux les observer. Ce n’est pas un super-héros,
juste un ancien prof d’université un peu bedonnant et voilà qu’une déesse en
personne lui donne la mission d’en tuer une autre, le dotant d’un casque
d’invisibilité. L’historien va d’abord obéir puis va se rebeller contre les
dieux dont le seul plaisirs semblent de manipuler les individus. Il réussira à
soulever les troyens et les athéniens contre les dieux eux-mêmes.
Résumer ainsi Ilium est en soit très réducteur. En me
concentrant sur l’histoire centrale de l’historien, je suis passé
volontairement à côté de deux autres histoires, tout aussi importantes.
Celles-ci évoluent en parallèle et, a priori, n’ont aucun rapport avec la
guerre de Troie. L’une d’elle dépeint une société terrienne décadente réduite à
un millier d’individus. C’est une société ignorante de son passé, complètement
encadrée par des robots. Un groupe de personnages s’y dégagent et se lancent
dans une quête de leur origine. On ira de découverte en découverte jusqu'à la
révélation finale. La dernière histoire
parallèle est tout aussi surprenante puisqu’il s’agit cette fois de robots
dotés d’intelligence artificielle venant de Jupiter et qui sont envoyé sur Mars
pour enquêter sur les troubles quantiques qui émanent de la planète et menacent
le système solaire.
Trois histoires qui n’ont a
priori rien en commun et qui sont menées de front par Simmons avec un réglage
d’horlogerie (l’ordre de lecture « guerre de Troie, quête des derniers
terriens, robots de Jupiter » est respecté tout le long du livre et ne
verra des exceptions que dans les dernières pages). Scénaristiquement
différentes, ces histoires parallèles le sont aussi sur le plan stylistique. En
effet, la partie de l’historien est toujours écrite au style direct au présent
(c’est l’historien qui raconte ce qu’il voit et avec ces mots, ce qui permet un
peu d’humour et quelques familiarités) tandis que les autres parties sont
écrites dans un style plus travaillé, au passé et au style indirect. La grande
qualité du livre est de nous rendre attachant tous ces personnages très
différents. Revers de la médaille, il faut parfois s’accrocher un peu pour ne
pas perdre le fil. La relation entre les trois histoires n’apparaît en effet
que très (trop ?) tardivement, c’est à dire dans les 50 dernières pages
(sur un peu plus de 600). Tout le long de la lecture, on est contraint
d’ébaucher des théories pour comprendre le pourquoi et le comment de telle
histoire. C’est en ça que le livre peut apparaître déconcertant. Simmons nous
mène de la guerre de Troie à l’orbite de Jupiter en repassant par les derniers
terriens avec une facilité incroyable… et il faut savoir le suivre !
Difficile de résumer un livre
aussi énorme en quelques lignes vous l’aurez compris. Ilium est souvent surprenant et nécessite de ne pas en perdre une
miette, mais il vaut vraiment le coup et il est tout simplement passionnant. Ce
livre a eu une suite en 2006 intitulée Olympos.
J’y reviendrais un autre jour.